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10 mars 2009 2 10 /03 /mars /2009 08:28
Trois metteurs en scène se sont essayés à l'adaptation sur grand écran du célèbre roman graphique de Alan Moore. Gilliam, Aronofsky et Greengrass ont tour à tour renoncé à ce projet. Et si ils avaient raison ?

Zack Snyder est un réalisateur réputé comme étant passionné et cultivé. Je ne sais pas la considération qu'il faut porter à cette opinion, surtout au pays des yes men et des faiseurs aux billets verts, mais toujours est-il qu'il a acquis sa réputation avec le l'adaptation du 300 de Frank Miller.
D'aucuns ont toujours dit que Watchmen était cinématographiquement inadaptable. Réaliser une adaptation cinématographique suppose la connaissance du sujet de fond, mais surtout une appropriation de l'oeuvre par un auteur de cinéma et non de littérature. Tout livre  (y compris un comic book qui aurait le confort illusoire d'un story board né) compose une ambiance, un univers et des tensions qui sont régis par des règles avant tout littéraires. Les Watchmen sont célèbres non pas pour leurs images exceptionnelles et leur mise en couleur un brin criardes, mais pour le verbe et le ton distancié tranchant véritablement avec des cases désuètes et caricaturales. Les personnages se pensent et vous parlent avec ironie, communique une drôle d'impression d'être à la fois dedans et dehors de leur univers apocalyptique.

Pour adapter et non transcrire un univers qui n'a pas été pensé pour le cinéma, il faut donc volontairement personnaliser l'oeuvre grâce à la mise en scène en donnant une personnalité et une vision qui est celle du metteur en scène. Adapter, c'est donc prendre des risques dans le forme, mais pas nécessairement dans le fond, dès lors que les intentions du scénario correspondent à ceux de l'auteur. Pour respecter les intentions de l'auteur, il est souvent indispensable de plier les dialogues et l'histoire à proprement dit d'un livre, qui correspondent très rarement aux mécanisme du cinéma , de la narration, et du rythme.
Les peureux fascinés par une oeuvre font ce que des générations avant eux ont fait : le décalque, la transcription. Snyder est sans doute un grand fan du livre de Moore, mais il a été incapable d'ingurgiter le propos du film, de le digérer et d'en faire une véritable oeuvre de cinéma qui soit régit par ses propres codes. La distanciation des personnages sur leurs actions, la mélancolie maladive et l'oppression permanente du cataclysme nucléaire sont phagocytées par le respect du mot et du dialogue originels. Les sensations sont passées à la trappe face au respect aveugle du verbe. Le roman qui est un pavé de 400 pages a un rythme cassé qui est nécessairement rythmé par des intermèdes qui donnent la sensation que ce monde sous tension est figé. Ici, les protagonistes passent d'une scène à une autre avec très peu de réflexion et d'introspection. On ignore les tenants et les aboutissants, on suit des scènes cadrées et dialoguées comme dans le roman graphique, mais qui n'ont pas l'émotion et la tension qui sont celles du roman.
Ce n'est pas un défaut de fidélité qui est en jeu, mais un zèle aveugle et une paresse (ou un manque de talent ?) cinématographique qui font échouer tristement mais sans farce ce projet qui aurait du être plus ambitieux.
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